Décès de Mohamed Karim Lamrani, ancien premier ministre de Hassan II

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Contrairement à l’idée véhiculée par certains et reprise sur le site Wikipedia, Karim Lamrani n’a pas fait sa fortune à l’OCP, mais bien avant. C’est un self made man à qui le gouvernement Abdellah Ibrahim a avait confié la direction de l’office chérifien des phosphates. Jeune entrepreneur brillant et dynamique, il en a fait ce qu’il est aujourd’hui. Dans un long portrait que  le magazine Telquel a consacrée au défunt en 2014, on peut savoir que  » Karim Lamrani n’est pas né avec une cuillère en argent dans la bouche. Dans les confins de la vieille médina de Fès, il grandit sans père, recueilli par un oncle aisé, qui lui ouvre une boutique dans les ruelles de Boujloud. Le jeune Lamrani y vend des postes radio dès la fin du collège, préférant le commerce aux études. « A quelques mètres de son échoppe se trouvait le magasin de mon père. Il y vendait des céréales », se souvient Mohamed Lahbabi, qui croise Lamrani de temps en temps lorsqu’il rendait visite à son père et qui fondera, plus tard, aux côtés de Abderrahim Bouabid et de Mehdi Ben Barka, l’UNFP, ancêtre de l’USFP. Un concours de circonstances qui déterminera le parcours du futur Premier ministre. Aux premiers temps de l’indépendance, Lamrani prospère à Casablanca : l’autodidacte qu’il est se mêle aux Français depuis des années, fait des affaires, amasse sa fortune, pose la première pierre du capitalisme privé marocain et récolte, peut-être sans le savoir, les premiers fruits de l’Etat postcolonial.

Lahbabi, lui, est membre du cabinet de Bouabid, lui-même ministre de l’Economie nationale sous le gouvernement Bekkay Ben M’Barek Lahbil. « L’une de nos premières missions était de reprendre en main l’OCP, explique Lahbabi. Bouabid m’a demandé si je connaissais de jeunes Marocains qui avaient fréquenté les milieux d’affaires français. J’ai tout de suite pensé à Karim Lamrani. » Le jeune homme d’affaires, installé rue Magellan à Casablanca, reçoit Lahbabi et accepte de venir à Rabat, de devenir le secrétaire général de l’OCP et de s’occuper de ses affaires administratives. « Un mois plus tard, raconte Lahbabi, il revient me voir : on lui demandait de s’occuper de l’histoire d’un chaouch qui avait un problème de retraite, et celle d’un muezzin à Rabat. Il m’a demandé si c’était ça, l’OCP. »Lahbabi en informe Bouabid, qui lui donne carte blanche : tous les dossiers de l’Office sont confiés à Lamrani, ce qui provoque la démission de Jacques André Bondon, dernier directeur général français. « Nous avons ensuite nommé M’hamed Zghari, grande figure de l’Istiqlal à Fès, à la tête de l’OCP », poursuit Lahbabi. Cette nomination a lieu pour la forme, semble dire Lahbabi à demi-mot, insistant sur l’importance de Karim Lamrani, devenu le véritable homme fort de l’OCP. Il faudra pourtant attendre 1967 pour que ce dernier soit officiellement nommé directeur général, et qu’il travaille avec Abraham Serfaty, amené par le même Mohamed Lahbabi… « .

Karim Lamrani a donc plusieurs casquettes. Celle du self made man qui a pu concilier gestion gouvernementale et promotion de ses affaires personnelles, et celle du  technocrate d’origine politique. En fréquentant Bouabid et les autres, il connaissait aussi bien le monde politique que celui des affaires et de l’administration. « Incontestablement, son succès dans les affaires a plaidé pour lui dans la sphère, analyse Hassan Aourid. Mais, surtout, le fait qu’il ne soit pas politiquement coloré l’a beaucoup aidé. Dans les moments de transition, lorsque l’horizon politique n’était pas clair, c’était le joker de Hassan II. »

Abc24.ma présente ses condoléances à son épouse et ses enfants  Saida, Latefa et Hassan ainsi qu’aux membres de sa famille, ses proches et ses amis.

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