Canada: deuxième mandat, mais sans majorité, pour Justin Trudeau

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epa07939713 Canadian Prime Minister and Liberal Party leader Justin Trudeau waves to the crowd during a victory speech in Montreal, Quebec, Canada, 21 October 2019 (issued 22 October 2019). Trudeau has retained his position as Canadian Prime Minister in the federal election but will be forced to form a minority government. EPA-EFE/VALERIE BLUM

Le Premier ministre canadien Justin Trudeau a obtenu un deuxième mandat lundi mais son parti libéral s’est contenté d’une majorité relative au Parlement, ce qui l’obligera à compter sur l’appui d’un petit parti de gauche pour survivre.

Selon les projections des télévisions vers 06h00 GMT mardi, les libéraux avaient remporté ou étaient en tête dans 156 des 338 sièges en lice à la Chambre des communes. Dans l’assemblée sortante, ils disposaient d’une confortable majorité absolue de 177 sièges.

« Vous l’avez fait mes amis, félicitations », a lancé un Justin Trudeau tout sourire à ses partisans réunis au centre de Montréal.

« Ce soir les Canadiens ont rejeté la division », a-t-il ajouté. Ils « ont rejeté les coupes et l’austérité et voté en faveur d’un programme progressiste et d’une action forte contre le changement climatique ».

Quasiment au même moment, son rival malheureux, le chef conservateur Andrew Scheer reconnaissait sa défaite et félicitait le Premier ministre, tout en lui adressant une mise en garde.

« Son leadership est endommagé et son temps au gouvernement va bientôt prendre fin », a-t-il prévenu. »Quand ce moment viendra les conservateurs seront prêts ».

Les gouvernements minoritaires au Canada ont une espérance de vie estimée par les experts entre 18 et 24 mois en moyenne.

Sans attendre les résultats définitifs, le président américain Donald Trump a quant à lui salué dans un tweet la victoire de M. Trudeau, « magnifique et remportée de haute lutte ». Il s’est dit heureux de poursuivre sa collaboration avec M. Trudeau, avec lequel il a eu des relations parfois compliquées depuis le G7 de 2018 au Canada.

Alors qu’ils étaient donnés au coude-à-coude avec les libéraux par tous les sondages, les conservateurs devraient se contenter d’un peu plus de 120 circonscriptions, suivis des indépendantistes du Bloc québécois (32) et du Nouveau Parti Démocratique (NPD, gauche) avec 24 sièges. Tous les dirigeants des grands partis ont été réélus.

M. Trudeau remporte donc son pari d’un deuxième mandat, malgré les nombreux scandales qui ont marqué ses quatre années au pouvoir et les attaques souvent virulentes de l’opposition sur son bilan. Mais il ressort affaibli de ce scrutin pour se maintenir au pouvoir, il devra obtenir le soutien d’un petit parti, vraisemblablement le NPD de Jagmeet Singh.

Dès mardi, le dirigeant libéral pourrait donc entamer de délicates discussions en vue d’accords ponctuels lors des votes à la Chambre.

« Il y aura sans doute un rapprochement plus facile entre les libéraux et le NPD qu’avec le Bloc », estime Hugo Cyr, politique à l’université du Québec à Montréal.

« Si le parti libéral fait les concessions attendues par le NPD, ça peut être assez solide, on peut s’imaginer que ça durera au moins 18 à 24 mois », estime-t-il. « Mais c’est certain que le parti libéral devra mettre un peu d’eau dans son vin ».

Il devra ensuite former un nouveau gouvernement, rédiger son programme législatif puis le soumettre au vote du nouveau Parlement lors du discours du Trône. C’est lors de ce vote de confiance que le nouveau gouvernement minoritaire connaîtra son baptême du feu.

De son côté, le chef du Bloc québécois Yves-François Blanchet s’est félicité de son bon score au Québec, seule province où il présentait des candidats. Il devrait quasiment y tripler son score de 2015 et faire jeu égal avec les libéraux.

M. Blanchet s’est dit ouvert à une collaboration ponctuelle avec le nouveau gouvernement Trudeau, à condition que les intérêts du Québec soient préservés.

« Le Bloc peut collaborer, au mérite, avec n’importe quel gouvernement. Si ce qui est proposé est bon pour le Québec, vous pourrez compter sur nous », a-t-il lancé à ses militants.

A 47 ans, Justin Trudeau n’a plus les atouts de la jeunesse -MM. Scheer et Singh ont 40 ans- et de la nouveauté qui avaient contribué à le porter au pouvoir, à la surprise générale, en 2015 face au conservateur Stephen Harper.

Et le dirigeant libéral termine son premier mandat affaibli par plusieurs scandales. Sa popularité a chuté après une affaire d’ingérence politique dans une procédure judiciaire et la publication en pleine campagne de photos de lui grimé en Noir (« blackface ») a brouillé son image.

Tout au long de la campagne, il a défendu son bilan: économie solide, cannabis légalisé, taxe carbone, accueil de dizaines de milliers de réfugiés syriens, accords de libre-échange signés avec l’Europe ou les Etats-Unis et le Mexique…

En face, M. Scheer promettait un retour à l’équilibre budgétaire, des baisses d’impôts, avec un objectif simple: « remettre de l’argent dans la poche des Canadiens ».

Le conservateur aux valeurs catholiques assumées a tenté de compenser une image un peu terne par des attaques en règle contre M. Trudeau.

Mais il n’a pas échappé à son lot de polémiques: hostilité personnelle à l’avortement et soupçons d’avoir commandité une campagne de dénigrement de son rival de la droite conservatrice Maxime Bernier notamment.

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