La Chine voit rouge et cible le vin australien

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La Chine dénonce « un préjudice important »: elle a annoncé vendredi l’imposition de lourdes mesures antidumping contre les vins australiens importés, accentuant sa pression sur l’Australie dans un contexte de tensions diplomatiques croissantes.
Les relations bilatérales ont commencé à se détériorer en 2018, lorsque Canberra a exclu le géant chinois des télécoms Huawei de la construction de son réseau 5G, au nom de la sécurité nationale.
Elles se sont encore tendues lorsque le Premier ministre australien Scott Morrison s’est aligné sur les Etats-Unis, en appelant en avril à une enquête internationale sur les origines du Covid-19.
Le nouveau coronavirus a été repéré pour la première fois fin 2019 dans la ville chinoise de Wuhan. Mais la Chine considère cette demande américano-australienne comme hostile et politiquement motivée.
Fin avril, l’ambassadeur de Chine à Canberra, Cheng Jingye, avait averti que la position de l’Australie sur le Covid-19 pourrait entraîner un boycott de la part des consommateurs chinois.
« Peut-être que les gens diront +Pourquoi boire du vin australien? Manger du boeuf australien?+ », avait-t’il déclaré dans une menace à peine voilée.
Premier partenaire commercial de l’Australie, la Chine avait suspendu quelques semaines plus tard les importations de boeuf de quatre gros fournisseurs australiens, puis imposé des droits de douane de 80,5% sur l’orge de ce pays.
Puis en juin, Pékin a invité les touristes et étudiants chinois à éviter l’Australie, justifiant cette recommandation par des incidents à caractère « raciste » contre des personnes d’origine chinoise.
En août, le ministère chinois du Commerce annonçait l’ouverture d’une enquête antidumping sur l’ensemble des vins australiens importés en 2019.
Le dumping, dont Pékin accuse Canberra, est une pratique qui consiste notamment à vendre à l’étranger à des prix inférieurs à ceux pratiqués sur le marché national.
Dans un communiqué publié vendredi, le ministère chinois du Commerce indique que l’enquête préliminaire montre que l’industrie viticole chinoise a subi un « préjudice important ».
Dès samedi, les importations de vin australien seront donc soumises à des surtaxes compensatoires comprises entre 107,1 et 212,1%, précise le document.
Le ministre australien du Commerce, Simon Birmingham, a fustigé une décision « manifestement injuste, déplacée et injustifiée ».
L’Australie « défendra vigoureusement » son secteur viticole contre les surtaxes imposées par Pékin et saisira l’Organisation mondiale du commerce (OMC), a assuré de son côté le ministre de l’Agriculture, David Littleproud.
Treasury Wine Estates, l’une des principales entreprises productrices du pays, a vu son action plonger de 11% vendredi à la Bourse de Sydney.
A Pékin, un porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Zhao Lijian, a jugé, vendredi devant la presse, légitimes les mesures antidumping afin de protéger producteurs et consommateurs chinois.
Il a rejeté la faute de la détérioration des relations bilatérales sur Canberra, appelant l’Australie à « faire son introspection » et à « commencer par se demander si elle a respecté les intérêts chinois ».
L’Australie était le principal exportateur de vin vers la Chine au premier semestre 2020 en volume, devant la France et le Chili, selon la Chambre de commerce alimentaire chinoise (CFNA).
Les exportations de vin australien vers le pays asiatique ont atteint l’an passé 1,25 milliard de dollars australiens (760 millions d’euros), selon Canberra.
A ce contexte déjà tendu entre Pékin et Canberra s’ajoute un autre domaine de discorde: les médias.
En août, Cheng Lei, une présentatrice australienne de la télévision publique chinoise en langue anglaise CGTN, a été arrêtée en Chine au nom de la « sécurité nationale ». Elle est détenue depuis au secret.
Quelques semaines plus tard, deux reporters australiens ont fui le pays dans des conditions rocambolesques par peur d’être arrêtés.
Ils se sont réfugiés pour l’un à l’ambassade d’Australie à Pékin, et pour l’autre au consulat d’Australie à Shanghai. Après négociations diplomatiques, tous deux ont accepté un interrogatoire avant d’être autorisés à quitter la Chine.
De son côté, Pékin a accusé en septembre des agents du renseignement australien d’avoir perquisitionné le domicile de quatre journalistes chinois basés en Australie, sur fond d’accusations d’espionnage.
Les correspondants avaient été interrogés, tandis que leurs téléphones, ordinateurs et tablettes tactiles de leurs enfants avaient été confisqués, selon la Chine. Pékin avait alors fustigé « des agissements barbares ».

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