Uber cesse ses activités au Maroc au bout de trois ans d’enfer

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Implanté à Casablanca et à Rabat, le groupe Uber, qui compte aujourd’hui 19 000 utilisateurs dans le pays, a décidé de renoncer au marché marocain. « L’incertitude réglementaire actuelle ne nous permet pas de fournir une expérience sûre et fiable […]. Ainsi, tant qu’il n’y aura pas de vraie réforme et un environnement favorable aux nouvelles solutions de mobilité, nous sommes contraints de suspendre nos opérations », indique un communiqué de l’entreprise américaine.

Cela fait près de trois ans qu’Uber, qui se présente comme « une plateforme de mise en relation » entre chauffeurs et passagers, tente de braver les obstacles juridiques au Maroc, où la loi oblige tout transporteur à détenir un agrément. Les chauffeurs Uber n’en ayant pas, ils exercent en toute illégalité. Le groupe californien a eu beau arguer qu’il existe un vide juridique lié au statut des VTC (voitures de transport avec chauffeur) et que les conducteurs ont un statut d’auto-entrepreneur, la pression exercée par les taxis, protégés par certains syndicats influents, a fini par l’emporter.

Depuis plus d’un an, les agressions de conducteurs de VTC émaillent l’actualité. Plusieurs vidéos relayées sur Internet montrent des chauffeurs assaillis par une horde de taxis déchaînés. En janvier 2017, les images choquantes d’une femme, conductrice du service de VTC Careem, un concurrent d’Uber, tabassée en pleine rue par plusieurs hommes, avaient particulièrement marqué les esprits.

Les chauffeurs Uber vivaient dans la peur non seulement d’être agressés, mais aussi d’être verbalisés par la police pour « travail clandestin ». « Si tu te fais arrêter, on te confisque ton permis pendant trois mois et on emmène ta voiture à la fourrière », témoigne Othman, un chauffeur qui a subi ce sort il y a quelques mois. En compensation, Uber rembourse le dépannage et verse des indemnités pour les trois mois non travaillés, calculées selon le nombre de courses à l’actif du conducteur.

Depuis l’annonce d’Uber, lundi, les taxis ne cachent pas leur joie à Casablanca. Certains klaxonnent pour manifester leur satisfaction. « Ces petits incompétents qui volaient notre clientèle sont finis », se réjouit ce chauffeur de taxi, qui, comme ses confrères, reproche aux VTC de ne pas payer des charges aussi lourdes qu’eux. Pour tenter d’apaiser la situation, Uber avait fait un geste en étendant son offre aux petits taxis. En vain.

L’avenir des chauffeurs Uber est des plus incertain. Un ex-Uber, qui dit avoir « vu venir la fin », a constitué un carnet d’adresses avec ses propres clients, qu’il continuera de transporter à son compte. « On a essayé de se structurer, de travailler avec sérieux, et ils nous poussent vers l’informel », s’exaspère-t-il. De son côté, Uber promet d’accompagner individuellement les 300 chauffeurs le temps de « cette transition difficile ».

L’entreprise se dit prête à revenir une fois que « de nouvelles règles seront mises en place ». En janvier, toutefois, le nouvel actionnaire principal, Rajeev Misra, a dit vouloir se concentrer sur les marchés prometteurs comme les Etats-Unis, l’Europe et l’Amérique latine. En d’autres termes, sortir des marchés émergents comme le Maroc.

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