L’intelligence artificielle s’installe dans les écoles américaines : entre sécurité et révolution pédagogique

L’intelligence artificielle (IA) fait une entrée remarquée dans le système éducatif américain, transformant radicalement deux aspects fondamentaux de la vie scolaire : la sécurité des établissements et les méthodes d’enseignement. D’un côté, des détecteurs d’armes ultra-modernes veillent à la sécurité des élèves dans le comté de Sevier. De l’autre, une école pilote au Texas expérimente un modèle audacieux où l’IA remplace les professeurs. Ces deux initiatives, bien que différentes, dessinent les contours de l’école de demain.

Des portiques de sécurité nouvelle génération

Dans le comté de Sevier, la routine matinale des collégiens et lycéens a changé. Ils passent désormais à travers de nouveaux portiques de détection d’armes fonctionnant à l’intelligence artificielle, à l’entrée comme à la sortie des cours. Le district scolaire a investi près d’un demi-million de dollars (environ 441 000 $) pour l’installation de 21 scanners « Evolv Express ». Chaque unité, coûtant 21 000 $, utilise des capteurs passifs et une analyse d’image par IA pour identifier en temps réel la présence de pistolets, couteaux ou toute autre arme potentielle. Cette technologie est déjà en usage dans des lieux à forte affluence comme le stade Neyland ou le parc d’attractions Dollywood.

L’initiative, proposée par la directrice des écoles du comté, Stephanie Huskey, a été rapidement adoptée. Billy Wilson, le proviseur du lycée de Pigeon Forge, confirme la fluidité de la mise en place. « L’objectif ultime est la sécurité de nos élèves et de nos enseignants. L’arrivée de ces machines a rendu le processus de contrôle très simple », a-t-il déclaré. « Nous avons expliqué la démarche à chaque niveau de classe pour rassurer les élèves sur le fait qu’il s’agit d’une simple mesure de précaution. Ils s’y sont habitués très vite. »

Le système est conçu pour être discret mais efficace. Si un objet suspect est détecté, un bip sonore alerte le personnel et une lumière rouge s’allume sur la machine. Un écran tactile affiche alors une photo de la personne avec un cadre rouge localisant l’arme potentielle. « Cela garantit que chaque élève est en sécurité, car si quelqu’un porte quelque chose d’interdit, le système le détectera », confie Marlown Antunes, un élève de terminale. « Au début, c’était un peu intimidant, on se demandait ce que c’était. Mais maintenant, ça fait juste partie de notre quotidien à l’école. »

Une technologie efficace mais controversée

Malgré son adoption croissante, notamment dans les écoles de la métropole d’Atlanta, la technologie d’Evolv suscite des doutes. Michael Dorn, directeur de l’organisation à but non lucratif Safe Havens International et expert en sécurité, exprime ses réserves. « Dans la plupart des écoles équipées, nos analystes sont convaincus qu’ils peuvent toujours faire entrer des armes à feu », affirme-t-il, accusant l’entreprise d’avoir surestimé l’efficacité de son produit.

Face à ces critiques, les responsables du district de Sevier rappellent que ces détecteurs ne sont qu’un élément d’un dispositif de sécurité plus large. « Aucun produit n’est totalement infaillible », admet un porte-parole, M. Ogle. « Il y a toujours un risque infime que quelque chose passe au travers. C’est pourquoi nous comptons sur les autres couches de protection que nous avons mises en place », comme des films balistiques pour les fenêtres et un système d’alerte d’urgence. Il est à noter que l’entreprise Evolv a déjà fait l’objet de poursuites de la part de la Commission Fédérale du Commerce (FTC) pour des allégations jugées trompeuses, un litige qui s’est soldé par un accord à l’amiable.

Quand l’IA remplace les professeurs

L’influence de l’IA ne s’arrête pas aux portiques d’entrée. À Plano, au Texas, l’école « Alpha » propose un concept encore plus radical : un apprentissage sans enseignants. Ce nouvel établissement, issu d’un programme en pleine expansion basé à Austin, utilise des programmes informatiques animés par l’IA pour dispenser les cours académiques, à raison de deux heures par jour.

« Chaque jour, l’intelligence artificielle adapte le programme d’apprentissage pour chaque élève, afin de combler ses lacunes spécifiques avant de passer à la compétence suivante », explique Amelia Baldwin, directrice des admissions chez Alpha. Le reste de la journée scolaire est consacré à l’acquisition de « compétences de vie » essentielles, telles que la ténacité, l’indépendance, le travail d’équipe et les bases de la finance, à travers des ateliers interactifs.

Un modèle élitiste avec une grande promesse

Le programme Alpha fait une promesse audacieuse : permettre aux élèves d’acquérir l’équivalent de deux années scolaires en une seule. « Les résultats sont là pour le prouver », assure Mme Baldwin. Au lieu de professeurs, l’école emploie des « guides ». Leur rôle est de motiver les élèves, de suivre leurs progrès et de superviser les ateliers. « Nous pouvons par exemple organiser une sortie spéciale pour toi si tu atteins tes objectifs en lecture », illustre Vanessa Watson, guide principale.

Ce modèle éducatif a cependant un coût : les frais de scolarité s’élèvent à 50 000 dollars par an. Actuellement, le campus de Plano ne compte que quatre élèves, encadrés par deux guides. « Alpha n’est pas la solution parfaite pour toutes les familles », concède Amelia Baldwin. « Je pense que chaque enfant a la possibilité d’y réussir, mais ce n’est pas forcément un modèle adapté à tous. » Ce programme exclusif a néanmoins déjà attiré l’attention, soulevant des questions fondamentales sur l’avenir de l’éducation et le rôle de la technologie dans la transmission du savoir.